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quinta-feira, 8 de outubro de 2009

 
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La mélancolie se lève chaque matin une minute avant moi. Elle est comme quelqu'un qui me fait de l'ombre, debout entre le jour et moi. Je dois pour m'éveiller la repousser sans ménagement. La mélancolie aime la mort, d'amour profond. Cela fait des années que je lutte avec ces profondeurs, que je m'efforce de limiter leur influence, sans y parvenir toujours. Seule la légèreté de la vie peut chasser l'insondable mélancolie. La légèreté m'est toujours venue du côté de l'amour. J'ai mis longtemps avant de voir ce qui séparait l'amour du sentiment: presque rien, un abîme. Le sentiment est du côté de la mélancolie. Il y tombe à coup sûr, tôt ou tard. Le sentiment et la mélancolie naissent d'une préférence de soi pour soi, d'une complaisance — exaltée ou effondrée — de soi pour soi. Le sentiment comme la mélancolie sont insondables, pleins de recoins et de remous. La mélancolie est la variété sombre du sentiment. Le sentiment comme la mélancolie adhère, attache, fusionne. L'amour coupe, tranche, détache, vole. Par le sentiment je suis englué dans moi-même. Par l'amour j'en suis détaché, arraché. Il y a dans la musique de Mozart un amour guerrier, actif. Il répond à la question qui se pose à moi chaque jour, dès le réveil: comment entrer dans ce premier matin du monde?


Christian Bobin in Mozart et la pluie, 1997.



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